Le métier de torréfacteur vu par Laurent, Kultivar à Nantes

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Le métier de torréfacteur vu par Laurent, Kultivar à Nantes

On peut sentir les effluves de café avant même d’arriver dans l’atelier de Kultivar Café tenu par Laurent, à deux pas de la place Saint-Félix à Nantes. Découvrez son parcours et le métier de torréfacteur à Nantes dans cette nouvelle interview !

Salut Laurent, dis-moi, comment es-tu arrivé dans le métier de torréfacteur ? Et comment se forme-t-on ?

Laurent : J’ai découvert le métier grâce à des rencontres, je ne dirais pas par hasard parce que c’est quelque chose qui m’intéressait parmi les nombreuses choses que j’avais en tête. J’étais ingénieur mécanicien de formation, c’est durant un long voyage que j’ai choisi de faire autre chose de ma vie. Et c’est dans une auberge en Colombie que j’ai rencontré un homme suisse-colombien qui montait une coopérative qui m’a parlé d’une école, dans la ville où nous étions. Je me suis rendu dans cette école et j’ai rencontré le directeur un peu par hasard. On a discuté et on s’est très bien entendus jusqu’à ce qu’il me dise que j’étais le bienvenu dans son école, ce que j’ai gardé en tête.

Quelques mois plus tard, je suis rentré en France et je me suis demandé ce que je souhaitais faire de ma vie et j’ai décidé de faire un stage chez un torréfacteur à Nantes. J’y ai pleinement découvert le café de spécialité et ça confirme ma volonté de faire ça. Plus tard, je retourne en Colombie, dans cette école sans trop savoir où je mets les pieds et c’était génial ! J’étais au contact de producteurs, j’ai été formé sur différents métiers du café. Je savais qu’il y avait quelque chose à faire à Nantes sur les cafés de spécialités, il n’y avait personne à l’époque.

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L’école se passe sur un an ?

L : Non, c’est à la carte ! Il y a plein de formations qui sont dispensées et puis c’est à la Colombienne, les plannings ne sont pas tous mis à jours (rires). Il faut se faire des contacts pour être tenu au courant. J’ai eu de la chance, mon voisin de pallier était dans la même école que moi et il m’a tout de suite guidé pour avoir les bonnes informations. Et aujourd’hui, je travaille toujours avec les personnes de l’école.

Il y a plein de moyens pour se former après, l’école réunit vraiment tout, mais ce ne sont pas des formations hyper poussées, ça te met seulement un pied dedans. Et tout ça permet de comprendre un peu la chaîne du café ou l’enchaînement des choses, mais après, il y a d’autres moyens de se former hors des écoles. Il y en a de plus en plus, il y en avait déjà à Londres, aux Etats-Unis et en France, mais maintenant, elles dispensent des formations plus ou moins complètes, c’est de mieux en mieux.

Et pourquoi Nantes ?

L : Parce que j’en avait marre de Paris, c’était trop grand. J’avais besoin de plus d’espaces verts et d’espaces tout court et ma femme et moi avions de la famille sur place, on aimait beaucoup l’ambiance.

« Plus de 80% des gens consomment du café industriel alors qu’il n’a rien de ce que peut-être le café gustativement »

D’accord et aujourd’hui, que préfères-tu dans ton métier ?

L : La relation avec les producteurs, je souhaite vraiment bien vendre mes produits, me concentrer sur les clients et les satisfaire. Mais je ne sais pas si je me vois faire ça toute ma vie, ce qui m’intéresse beaucoup, c’est ce qui se passe dans les champs, discuter avec les producteurs et élargir les pays avec lesquels j’aimerais travailler comme le Brésil, l’Ethiopie et tous ces pays pour créer des relations et ramener des produits originaux comme ce qu’on fait actuellement.

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Et qu’apprécies-tu le moins ?

L : Les horaires longs et fixes, les longues après-midi sans clients, mais ça fait partie du jeu !

Attention, la question un peu compliquée… Si tu devais expliquer à un enfant ton métier de torréfacteur et lui donner envie de le faire plus tard, que dirais-tu ?

L : Je commencerais par lui montrer le café vert et je lui dirais « tu vois le café de chez toi qui est noir ? Et bien moi mon métier c’est de le transformer en marron, de le rendre buvable et de l’interpréter à ma façon.

Selon toi, quelles sont les qualités requises pour être torréfacteur à Nantes ?

L : Honnêtement la rigueur. Pourtant, je suis pas très rigoureux, enfin si, je le suis sur certains points (rires). Mais en fait, c’est réellement un métier qui est très très exigeant dans le sens ou la moindre défaillance, le moindre écart par rapport à ce qu’on essaye de faire de ce qu’on vise idéalement, va se sentir. Que ce soit en torréfaction, au moment de la préparation du café ou même au niveau du stockage. Et c’est la même chose côté producteur, ça va très vite de contaminer un café et c’est quelque chose qui se sentira à la fin en tasse, donc vraiment l’exigence.

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Que dirais-tu aux personnes qui souhaitent se lancer en tant que torréfacteur ?

L : Qu’il y a de la place et plein de choses à faire. Aidons les gens à arrêter de consommer un produit standardisé, industriel qui a toujours le même goût. Plus de 80% des gens consomment du café industriel alors qu’il n’a rien de ce que peut-être le café gustativement.

Comment as-tu créé Kultivar à Nantes ?

L : J’ai été accompagné par Acte44 puis Initiative Nantes que je remercie d’ailleurs. Ça a été long, ça a commencé par une étude de marché assez classique et ça ne me parlait pas du tout. À force de creuser, d’insister, de rencontrer des gens, j’ai compris le principe de la chose. Donc j’ai fait une étude de marché à ma manière qui, je crois, a été plutôt correcte. Et ensuite, ça a été l’histoire du financement et de trouver un local parce que les deux sont directement liés.

Car on te donne un local si tu es financé, mais on te finance que si tu sais où va se trouver ton activité. Et voilà, je pense que c’est le cas pour tout le monde, mais ça, ça a été assez compliqué, même si au final, ça s’est bien fait et ça a été assez rapide.

« Et finalement, je ne suis pas du tout, tout seul, j’ai des collègues au quotidien avec qui on s’entend bien. C’est un petit microcosme ici »

Et tu as choisi le quartier Saint-Félix pour ta boutique Kultivar ?

L : Non, j’ai d’abord visité un ancien garage à Couëron qui ne me plaisait pas et à la fin de la visite le propriétaire m’a dit qu’il avait un autre local à Saint-Félix. Je connaissais pas du tout, je venais d’arriver à Nantes et c’est en suivant le propriétaire en voiture qu’on a vu qu’on se rapprochait du centre et là, c’était super intéressant comme quartier. Il m’a montré le local, il y avait beaucoup de travaux à faire, mais la situation était idéale et le loyer rentrait dans les cordes.

En plus, vous êtes bien entourés, les commerçants du quartier sont super sympas.

L : C’est vraiment le côté cool ! Je savais que j’allais ouvrir un truc tout  seul et je savais que ça pouvait être dur. Et finalement, je ne suis pas du tout, tout seul, j’ai des collègues au quotidien avec qui on s’entend bien. C’est un petit microcosme ici.

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Quelle est la réalisation dont tu es le plus fier dans ton métier de torréfacteur nantais ? 

L : De pouvoir acheter régulièrement du café aux personnes que j’ai rencontrées en Colombie et avec qui je travaille aujourd’hui. Parce qu’à la base, c’est avec eux que j’ai commencé à parler de ça. Et quand je suis parti de là-bas. Je leur ai dit, bon, à 95 %, on fait quelque chose. Et voilà, je suis content d’avoir réussi. Et puis petit à petit, ça augmente donc c’est cool, ça permet de faire travailler les gens et de les rémunérer correctement. Je vois qu’eux arrivent à construire des choses de leur côté qui sont en plus bénéfiques pour moi parce qu’ils améliorent leur qualité de vie et les choses qu’ils peuvent produire pour moi.

Quelles sont tes sources d’inspiration dans ton métier ?

L :  Les autres torréfacteurs évidemment, c’est important de rester à l’écoute de ce qu’il se fait. Les producteurs avec qui je travaille, ils sont issus d’une région où la population est complètement fan de café, ça fait partie intégrante de la culture et c’est une réalité au quotidien, c’est incroyable. Ils sont ultra innovants, que ce soit du côté des baristas comme du côté de la préparation, ils font des cafés complètements fous, ils travaillent sur des nouveaux procédés et ils m’envoient des résultats, ce sont vraiment eux qui m’inspirent.

Comment vois-tu ton métier demain ?

L : Pour moi, il y a un vrai sujet sur le transport, le café vient de loin généralement quelle que soit l’origine. J’aimerais que les modes de transports évoluent comme les transports à la voile qu’on peut voir de plus en plus. J’aimerais bien que les choses changent sur la manière dont le produit est traité, que ce soit plus écologique, que le transport s’améliore et qu’il y ait plus de transparence et surtout de reconnaissance envers le travail des producteurs. Il faut arrêter de considérer le café comme une commodité et lui rendre sa valeur.

Un petit mot de la fin ?

L : Découvrez le café de spécialité comme un produit de gastronomie avec toutes ses nuances et ses subtilités, Toutes les possibilités en fonction des terroirs, des variétés et des méthodes de séchage. Et que dans tous les restaurants, on puisse terminer sur un bon café.

Cet échange avec Laurent de Kultivar fût très enrichissant. Nous avons appris plein de choses sur le café, le métier de torréfacteur ou encore l’histoire de la création de l’entreprise. Si vous passez à quartier Saint-Félix à Nantes, on vous recommande vivement de passer par la boutique de Laurent et de découvrir ses cafés. Et si vous n’aimez pas le café, croyez-nous vous aurez de quoi faire des heureux !