C’est en plein cœur du quartier Saint-Félix, dans une boutique à la décoration quelque peu alsacienne, que Franck et son équipe vous proposent chaque jour de délicieux pains, viennoiseries et pâtisseries à La Petite Boulangerie. Nous sommes allés à la rencontre de Franck, boulanger depuis de nombreuses années pour en connaître un peu plus sur son histoire et le métier de boulanger.
Peux-tu te présenter ?
Franck : Je m’appelle Franck Dépériers, je suis artisan boulanger et j’ai créé, ici place Saint-Félix, La Petite Boulangerie il y a 25 ans.
Quel a été ton parcours pour devenir boulanger ?
F : J’ai un parcours classique. D’abord apprenti dans une petite boulangerie en Normandie, j’y ai ensuite travaillé pendant deux-trois ans avant de m’installer pendant une dizaine d’années en région parisienne. J’ai ensuite fait de la formation à l’Institut National de la Boulangerie à Rouen. En 1994, j’ai gagné le concours de meilleur ouvrier de France puis j’ai posé mes valises à Nantes où j’ai ouvert La Petite Boulangerie.
« Je ne voulais pas être dans un endroit trop visible, je voulais faire déplacer les gens »
Qu’est-ce qui t’a poussé à ouvrir ta propre boulangerie La Petite Boulangerie à Saint-Félix ?
F : Ce qui m’a incité à ouvrir ma propre boulangerie, c’est la soif d’entreprendre et la soif de faire plaisir aux gens. Quand on apprend à faire de bons produits, on a envie de les partager et la meilleure façon de les partager est de s’installer et d’ouvrir sa boutique. Ça permet de voir si les gens adhèrent à notre philosophie, à nos produits.
Pourquoi as-tu choisi le quartier Saint-Félix à Nantes ?
F : C’est arrivé par hasard. Nous avons visité plusieurs boulangeries à Nantes à vendre et ce qui m’a plu dans celle-ci c’est qu’elle était un peu à l’écart de la ville. Je ne voulais pas être dans un endroit trop visible, je voulais faire déplacer les gens. J’avais une vraie conviction dans ma philosophie et je me suis dit que si les produits étaient bons, les gens se déplaceraient et si ce n’était pas le cas, on referait nos valises pour s’installer ailleurs. Au début, les gens venaient timidement puis au fur et à mesure des années nous avons eu de plus en plus de monde.
« C’est le plus beau métier du monde »
Comment devient-on boulanger aujourd’hui ?
F : Pour devenir boulanger aujourd’hui, c’est le même parcours j’ai fait il y a 40 ans : on fait un apprentissage, c’est-à-dire un temps que l’on partage entre l’école et l’entreprise pour y apprendre le métier. Ensuite, il faut faire ses armes comme ouvrier On devient boulanger avec le temps. Les gestes et les sensations viennent avec l’expérience. Être boulanger c’est un métier de patience et de labeur.
Qu’est-ce que tu dirais aux personnes qui aimeraient se lancer dans le métier de boulanger ?
F : Je leur dirai que c’est le plus beau métier du monde. Ce métier, il m’a permis de faire plein de choses : de la boulangerie, de la formation… J’ai aussi travaillé dans un laboratoire en région parisienne et surtout grâce à mon métier, j’ai pu voyager. J’ai fait le tour du monde au moins dix fois dans tous les sens et prochainement, je vais me rendre au Japon. La boulangerie, comme la restauration ou la pâtisserie, ce sont des métiers où l’on peut voyager facilement, car l’étranger est très demandeur du savoir-faire français.
Tu n’as jamais eu envie d’ouvrir ta boulangerie à l’étranger ?
F : J’en ai eu l’opportunité puisqu’on m’a sollicité pour des projets à l’étranger, mais ça ne m’a jamais tenté, car je suis un peu casanier. Je me suis attaché au quartier Saint-Félix, j’aime être ici, j’aime les bords de l’Erdre et Nantes. Il y a un moment où il faut savoir où est notre bonheur. On court toujours après tout, mais on n’est jamais satisfait. Moi, je suis satisfait ici, je suis content d’être là et je suis heureux de travailler avec les personnes avec lesquelles je travaille.
À quelle heure commences-tu ta journée et à quelle heure la termines-tu ?
F : Quand on est artisan boulanger et qu’on a sa propre entreprise, la journée commence très tôt, mais surtout, elle ne s’arrête jamais. Physiquement, je commence à 3h30 du matin et je reste jusqu’à 20h le soir, lorsque la boutique ferme. Je suis toujours dans les parages, on va dire, je vais dormir une heure le midi puis je reviens. Et ça tous les jours.
Comment s’organisent tes journées et que préfères-tu dans ton métier ?
F : Je n’ai pas de journée type, mais globalement le matin, je suis en fabrication et l’après-midi, je fais différentes tâches : des papiers ou bien, je vais m’occuper d’un apprenti qui va faire des choses particulières. Pour moi, aucune journée ne se ressemble. Sinon, j’aime tout dans mon métier mais ce que j’adore c’est d’être à Saint-Félix.
« C’est un métier où l’on vend du plaisir (…). Moi, quand je fais du pain, j’essaye de faire le meilleur pain du monde. »
Quelle est la spécialité de La Petite Boulangerie ?
F : Notre spécialité, c’est la boule bio. C’est un produit que l’on fait depuis 25 ans. Je sais qu’il y a beaucoup de personnes qui se déplacent de loin pour ce produit-là. C’est un peu la carte de visite de La Petite Boulangerie.
Selon toi, quelles sont les qualités requises pour être boulanger ?
F : La chose la plus importante lorsqu’on est boulanger c’est de prendre du plaisir dans ce que l’on fait. Il faut apprécier le pain, le travail manuel et surtout, il faut avoir envie de faire plaisir aux clients. C’est un métier où l’on vend du plaisir. Si on n’a pas envie de faire plaisir aux gens, on n’a pas de plaisir à faire du pain. Moi, quand je fais du pain, j’essaye de faire le meilleur pain du monde. Je me dis que ma baguette va être sur une table, les gens vont s’y asseoir, vont la manger et il faut que ça leur laisse quelque chose. C’est mon objectif et c’est ce que j’essaye de transmettre aux jeunes. Je ne veux pas que les gens travaillent de façon mécanique, je veux qu’ils aient envie de faire de leur mieux, car il faut faire plaisir et si on ne fait pas plaisir, on n’a pas de clients.
Quel conseil pourrais-tu donner pour choisir son pain ?
F : Ce que je préconise, c’est d’acheter du pain qui soit un peu typé, c’est-à-dire plein de fibres : du pain complet, du semi-complet, avec des graines, avec des ajouts comme de la farine de seigle, de sarrasin ou plein d’autres choses. Du pain comme ça fait du bien à l’organisme et ne nous fait pas grossir, comme on l’a longtemps dit à propos du pain.
De quoi es-tu le plus fier aujourd’hui ?
F : Bien que je sois fier d’être boulanger, aujourd’hui, ce dont je suis le plus fier ce sont mes enfants, car ils m’ont permis de travailler librement. Je n’ai jamais eu de soucis avec eux, ils ont toujours été sympas. C’est tellement plus facile de travailler lorsqu’on n’a pas de souci chez soi.
Est-ce que tes enfants ont envie d’être boulangers ?
F : Non ils ne veulent pas (rires). Je ne les ai jamais incités à être boulangers. On ne les a pas élevés au-dessus de la boulangerie, on les a un peu cachés. La Petite Boulangerie, c’est mon histoire à moi, l’âme première, c’est moi. Ce n’est pas que je ne veux pas la partager, c’est ce que je ne veux pas embêter tout le monde avec ça. C’est mon histoire. Je donne beaucoup de moi-même, de mon temps, de mon énergie, de mon enthousiasme. Je ne veux pas que ce soit un poids pour mon environnement.
« Mon conseil ? Soyez positifs, soyez enthousiastes, la vie est belle ! »
As-tu une anecdote à nous raconter ?
F : J’en ai cent-cinquante mille des anecdotes (rires), mais je vais vous en raconter une à propos de Maxence qui a commencé en tant qu’apprenti chez nous. Il a failli nous quitter plein de fois, mais il est tellement attaché à La Petite Boulangerie et à l’équipe qu’il n’arrive pas à partir. Son contrat s’arrêtait à une date, il devait partir ailleurs, car il avait envie de changer par rapport à ce qu’il faisait chez nous, mais finalement, il n’était plus trop partant. Et puis en réfléchissant, en parlant, on a alors réussi à lui trouver un job complètement différent de ce pour quoi il a été formé chez nous. Cela nous a permis de nous développer et de nous donner de nouveaux challenges. Il m’a montré qu’il était vraiment attaché à la maison donc j’ai tout fait pour le garder. Et si dans un an et demi, il me dit qu’il en a marre de faire ce qu’il fait, mais qu’il a toujours le même plaisir et le même sérieux à être chez nous, on trouvera d’autres challenges.
On dit aujourd’hui que les gens font tout pour quitter les entreprises et chez nous, on a des gens qui ne veulent pas nous quitter et qui me prouvent au quotidien qu’ils ont envie de travailler avec moi alors, je fais le maximum pour leur faire plaisir.
Un petit mot pour la fin ?
F : Il faut être positif. Soyez positifs, soyez enthousiastes, la vie est belle ! On vit en France, tout va bien. J’entends que des choses négatives, j’allume la télé, la radio, on entend les discussions, mais tout va bien. En France tout va très bien, on est heureux, on a le droit de choisir son métier, j’ai choisi le mien, choisissez le vôtre. Je regarde toujours le soleil, je ne regarde jamais la pluie.
Un grand merci à Franck de nous avoir ouvert les portes de La Petite Boulangerie. Si, comme nous, vous aimez le bon pain et les bonnes pâtisseries nantaises et viennoiseries issus d’un savoir-faire incontestable, allez faire un tour à La Petite Boulangerie… Et découvrez nos autres coups de cœur de boulangeries en Loire Atlantique.